En me baladant à Beaubourg, un écrivain de rue m'écrivit une poésie sombre sur le thème : " L'art est un plaisir ". Voici sa version et ma version papier.
Quand la sève
propulsée par un canon, un canal
commande mes doigts
autrement en bouillie
J'aimerai dire oui
quand ma colonne et mes tempes
se tendent
et ma respiration goûte à un feu
qui la rend haletante
J'aimerai dire oui
quand les mots jaillissent puis
éclatent sur la page
aimantant mon regard surpris
J'aimerai dire oui
quand il ne fait aucun doute
même si je suis dans le noir
J'aimerai dire oui
quand ma création féconde mon bonheur
qui la féconde au retour
a l'infini
J'aimerai dire oui
mais parfois je me rêve jardinier
ou balayeur ou rien du tout
ou rien de rien
car il me poursuit de ses yeux fous.
Dans un carnet, un pasteur raconte son histoire lors de la guerre 14-18 :
" J'appris la mort du capitaine Mautaubon et dès que cela me fut possible je partis à la recherche de son corps. Les hommes avaient pu le transporter quelques centaines de mètres derrière l'endroit où il était tombé et c'est là que je l'ai revu. La mort a été instantanée Il a été frappée dans la région abdominale de telle façon que le doute n'est pas possible : Il n'a pas souffert. Une autre blessure au bras et elle seule était grave.
Le visage n'avait pas souffert et était empreint de calme. J'ai pu faire moi même à cet endroit l'inventaire de ce qu'il avait sur lui et tout je joins une copie à cette lettre. Je ne puis dire assez combien cette lugubre opération m'a été pénible. Non seulement parce que les obus pleuvaient autour de moi, mais bien plus encore parce que je m'étais attaché au capitaine Mautaubon, je l'avais vu le jour de son évacuation des Flandres et avais reçu de lui une bonne lettre pendant son séjour à l'hôpital.
Par mes soins le corps a été transporté à 4 kilomètres à l'arrière dans le cimetière où sont enterrés nos chers morts de la division. C'est une grande clairière dans la forêt, à l'est du village de Champillon près d'Epernay. Je joins également un plan de l'endroit et j'enverrai une photographie de la tombe, dès que la croix aura été posée. "